mardi 6 octobre 2015

Libre d'apprendre BLOG28, Le jeu nous rend humain 4, Quand le travail est du jeu

Le jeu nous rend humain 4, Quand le travail est du jeu
Est-ce que votre travail est du jeu ? Il peut l'être.

Une des premières et peut-être la plus renforcée des leçons qu'un enfant apprend à l'école est que le travail et le jeu sont des opposés. Le travail est ce que l'on doit faire tandis que le jeu est ce que l'on veut faire. Le travail est pénible, le jeu est amusant. Le travail est essentiel, le jeu est futile. Pourtant lorsque nous quittons l'école et allons dans le « monde réel », certains d'entre nous, les chanceux, découvrent que le travail n'est pas l'opposé du jeu. En fait, le travail peut être du jeu, ou du moins, il peut être imprégné d'un haut degré d'esprit de jeu. Quand le travail est du jeu, il est humanisant. Il fait ressortir nos meilleures qualités et nous fait nous sentir bien. Quand le travail est un labeur, l'opposé du jeu, il peut être déshumanisant. Nous devenons des bêtes de somme et cela peu importe si la charge s'applique à nos muscles ou à nos esprits. Quelles sont les qualités qui peuvent rendre notre travail du jeu plutôt qu'une charge ?

Dans la série « Le jeu nous rend humain », j'avais au départ souhaité consacrer un essai au sujet du travail. Mais ensuite j'ai réalisé qu'un seul essai serait inadapté, j'ai alors décidé d'y consacrer deux essais qui seront juste un peu moins inadaptés. Dans ce premier essai, je me concentre sur la définition du jeu et comment un emploi rémunéré peut correspondre à cette définition. Dans le prochain essai, je décrirais comment les chasseurs-cueilleurs ont minimisé la distinction entre le travail et le jeu et je suggérerais des moyens par lesquels nous pourrions les imiter sur ce sujet.

Définition du jeu
Dans un essai précédent sur la définition du jeu, j'ai élaboré l'idée que le jeu est une activité structurée qui est (a) choisi par soi-même, (b) autodirigé, (c) imaginative ou créative, (d) intrinsèquement motivée et (e) produite dans un état d'esprit actif, alerte et sans stress. Lorsque n'importe quelle activité a ces caractéristiques, nous en faisons l'expérience comme d'un jeu. Le travail dans ce qu'il a de meilleur, peut avoir toutes ces caractéristiques à un haut niveau. Laissez-moi l'expliquer.

(a) Le travail peut être choisi par soi-même

Le jeu est ce que l'on choisit de faire, non pas ce que l'on doit faire, ainsi plus nous faisons l'expérience d'un sens du choix à propos de notre emploi, plus nous en faisons l'expérience comme un jeu. Si vous sentez que la nécessité vous impose de travailler dans tel ou tel boulot, alors il sera difficile pour vous de maintenir une attitude d'esprit de jeu à votre travail. Plus vous vous sentez libre de quitter votre travail, plus facile il sera pour vous de faire l'expérience de votre emploi comme d'un jeu. Le jeu est par définition, une chose que vous êtes toujours libre de quitter. Si vous ne pouvez pas le quitter, vous n'avez alors pas le sens du choix et l'activité n'est pas du jeu.

Il y a quelques années, Reed Larson et ses collègues ont conduit une recherche dans laquelle des hommes et des femmes mariés qui avaient tous un travail hors de leur maison, portaient des bipeurs sur eux tout au long de la journée et lorsque le bip sonnait, ils écrivaient sur un support des informations à propos de leurs activités et de leurs états d'esprits. Une découverte majeure fut que les femmes étaient plus heureuses que les hommes lorsqu'ils sont à leur travail hors de chez eux, et les hommes sont plus heureux que les femmes lorsqu'ils font des travaux à leur maison, comme cuisiner ou faire le ménage. [1]

Les chercheurs ont interprété cela comme étant lié à l'élément du choix. Du temps où cette étude a été réalisé, le travail hors de la maison était vu comme une plus grande nécessité pour les hommes que pour les femmes. Les hommes se sentaient souvent alourdis par un tel travail, parce qu'ils sentaient n'avoir pas de choix en ce qui le concerne. C'était de leur devoir de participer à la course folle pour soutenir leurs familles. En contraste, les femmes étaient relativement plus disposées à sentir que le travail hors de la maison était un choix libérateur, non un devoir et ce sentiment les a aidé à donner à leur travail une qualité de jeu. Pour le travail à la maison, l'opposé est vrai. Les femmes sentent avoir peu de choix en ce qui concerne le ménage, la cuisine et le reste, ce qui fait qu'elles se sentent parfois en colère ou s'ennuie lorsqu'elles sont amenées à participer à ces tâches. Les hommes, quant à eux, avaient plus le sentiment que leur travail domestique était optionnel. Ils aidaient à la maison avec galanterie en faisant quelque chose qui n'était pas de leur ultime responsabilité.
Comme la fait remarquer Larson et ses collègues, les découvertes correspondent à certains stéréotypes de genre dont il reste peut-être encore une parcelle de vérité dans notre culture. Les hommes « esclaves » au travail et rentre à la maison pour se détendre et se faire plaisir. Les femmes « esclaves » à la maison, sortent pour se détendre et se faire plaisir.

L'idée plus large montrée ici est que, peu importe le genre de travail que nous faisons, plus nous pouvons adopter l'attitude que nous n'avons pas l'obligation de faire ce travail, plus nous pouvons faire l'expérience du travail comme un jeu. L'esclavage est interdit aujourd'hui ce qui fait qu'en théorie nous pourrions tous avoir l'opportunité de choisir le travail par lequel nous avons un revenu, bien que je reconnaisse que les conditions économiques peuvent rendre cela très difficile.
Bien entendu, les enfants scolarisés font l'expérience d'absence de liberté en étant à l'école ou pas. Ils ont l'obligation par la loi d'y être. C'est une des raisons pour laquelle les enfants scolarisés font rarement l'expérience de leurs travaux scolaires comme étant du jeu. Dans notre société, nous ne donnons pas aux enfants les mêmes libertés fondamentales que nous donnons aux adultes.

(b & c) Le travail peut être auto-dirigé et créatif

Les joueurs sont des électrons libres. Non seulement ils choisissent librement le jeu qu'ils joueront ou pas, mais ils choisissent aussi de la façon dont ils le joueront. Ils doivent suivre les règles, mais à l'intérieure des lignes directrices de ces règles, chacun de leurs mouvements doivent être les leurs. Les joueurs ne sont pas les rouages d'une machine qui est contrôlée par quelqu'un d'autre. Il n'est pas surprenant de voir que les travailleurs qui sont libres de prendre des décisions relatives à leur travail ont plus de chances de faire l'expérience de leur travail comme d'un jeu que ceux qui n'ont pas cette liberté. Rien n'enlève plus l'esprit de jeu du travail que ne le fait d'être microgéré par un chef.

Une raison pour laquelle les enfants font l'expérience de leur travail scolaire comme étant à l'opposé du jeu vient de la surveillance étroite de ce travail. Les enfants scolarisés, bien plus que n'importe quels employés que je connaisse, sont constamment sous la houlette de leur chef (leur enseignant dans ce cas). On leur dit simplement ce qu'ils doivent faire, comment et quand le faire puis tous les détails de ce qu'ils font sont jugés et évalués par des critères qui ne sont pas les leurs. Ce genre de travail est vraiment l'opposé du jeu. Pourtant dans le monde réel à l'extérieure de l'école, dans les lieux où l'esclavage a été interdit, les personnes ne sont jamais contrôlés aussi étroitement.

Dans une étude classique sur la satisfaction au travail, le sociologue Melvin Kohn et ses collègues ont identifié une constellation de caractéristiques de travail auxquels ils se réfèrent comme de l'auto-direction professionnelle. Les emplois qui sont imprégnés de ces caractéristiques sont (a) compliqués plutôt que simple, (b) varié plutôt que routinier, (c) peut soumit à la surveillance des autres. [2] Ce sont bien sûr précisément les caractéristiques qui demande un haut degré de prise de décision et de créativité au travail. Kohn et ses collègues ont découvert que l'auto-direction était désirée et appréciée autant dans les emplois d'ouvriers que ceux de cadres. Bien que les chercheurs n'aient pas décrit leurs découvertes en terme de jeu, mon point de vue est que l'auto-direction professionnelle est cruciale pour l'esprit de jeu au travail. Que vous soyez un plombier ou un avocat, vous ferez l'expérience de votre travail comme d'un jeu en fonction du degré d'auto-direction professionnelle.

Kohn et ses collègues ont découvert que les travailleurs qui sont passé d'un travail ayant peu d'auto-direction professionnelle à un travail qui en a plus ont non seulement eu plus de plaisir au travail mais ont aussi changé psychologiquement à travers le temps. Ils devinrent plus souples et moins rigides à leur domicile ou lors de leurs activités de loisirs en même temps que dans leur travail. Leurs styles éducatifs à l'égard de leurs enfants devint plus démocratiques et moins autocratiques. Ils commencèrent à donner de la valeur à la créativité et à l'autonomie de leurs enfants plutôt que leur demander une obéissance aveugle. En d'autres mots (les miens, non ceux de Kohn), leur vision totale de la vie devint plus ludique que ce qu'elle était.


Le travail peut être intrinsèquement motivé

Le jeu est motivé par lui-même, ce qui veut simplement dire qu'il s'agit d'une activité amusante qui est réalisée pour le simple fait de la réaliser plutôt que pour obtenir un résultat final. Il s'agit de la construction d'un château de sable sur la plage que les joueurs apprécient et non pas le château de sable créé. S'ils sont vraiment en train de jouer, c'est le processus de gagner des points ou d'essayer de les gagner qui plaît aux joueurs de tennis et non pas les points eux-mêmes. En d'autres mots, lors d'un jeu, c'est les activités elles-mêmes qui sont la source du plaisir, tout produit qui pourrait en émerger en un effet secondaire.

Le travail ne peut jamais être complètement motivé par lui-même. Par définition, l'objectif du travail est de produire une valeur finale, tel que réparer la plomberie ou obtenir un succès à la défense de son client lors d'un procès, ou produire un salaire à ramener chez soi pour subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille. Pourtant les motivations extrinsèques et intrinsèques ne s'excluent pas mutuellement. Vous pouvez travailler pour une valeur finale et en même temps faire attention et apprécier le processus. Plus le niveau auquel vous consacrez votre attention au processus augmente, plus votre travail est un jeu.

Si je me concentrais seulement sur le résultat final de mon travail d'auteur qui est une œuvre publiée ou le revenu issu de cette œuvre, alors écrire serait un fardeau. Quand je faisais cela, alors l'écriture elle-même serait seulement un moyen pour atteindre une fin. Dans ce cas, je trouve qu'il est difficile de commencer, et lorsque je commence, l'écriture est traînante et monotone. L'écriture est alors un travail et pas du jeu. Pour faire de l'écriture un jeu, je dois retirer mon attention du résultat. Bien entendu, je n'oublie pas complètement le résultat final, mais je le pose sur une étagère au fond de mon esprit de manière à pouvoir mettre mon attention sur le processus qui est le processus de génération d'idées et de compositions de phrases qui permettent de les exprimer. Je peux me convaincre moi-même que le résultat final n'a pas d'importance, qu'écrire est tellement amusant que ça a de la valeur en soi, même si l’œuvre n'est jamais publiée, qu'elle n'a jamais aucun effet dans le monde et que je n'y gagne pas un centime. De manière paradoxale, quand je réussis à prendre cette attitude de jeu, le résultat final est bien meilleur que lorsque je ne le fais pas. Et la même chose est vraie pour toutes les tâches que je fais, que ce soit laver le linge, cuisiner ou couper l'herbe.

Lorsque nous sommes exclusivement orientés vers un objectif, nous voyons l'activité nécessaire pour achever ce but comme un mal nécessaire, alors nous l’exécutons de la manière la plus minimale possible que nous estimons acceptables. Nous faisons juste ce qui est nécessaire pour gagner son salaire, pour satisfaire le patron ou pour préparer un repas que votre famille ne rejettera pas. À l'école, nous faisons juste ce qui est nécessaire pour obtenir la note que nous estimons choisi comme objectif. En contraste, quand nous nous permettons à nous-même d'être absorbé par le processus comme un jeu, nous accomplissons parfois bien plus. Par simple plaisir nous pouvons produire bien plus que ce qu'il était prévu de produire originalement, et le produit final pourrait être bien meilleur. Cela pourrait même devenir une création artistique. Cela peut être vrai alors que vous réparez la plomberie, que vous coupez l'herbe, que vous faites un repas, que vous réalisez un dossier d'affaire ou que vous écrivez un essai.


(e) Le travail peut comporter un état mental vif, attentif et sans stress

La caractéristique finale découle naturellement des autres. La prise de décision, la créativité et l'attention sur le processus qui est caractéristique du jeu nécessite et produit en même temps une vigilance mentale. Une réduction de l'attention sur la finalité et les autres évaluations réduit ou même élimine notre peur de l'échec. Pour la plupart d'entre nous, notre travail n'a pas de conséquence de vie ou de mort, ce qui fait que les peurs que nous avons de l'échec à peu de chances d'être porté à exagération. Toutefois, même des personnes telles que les chirurgiens, les pompiers ou les policiers qui peuvent se retrouver dans des situations de vie ou de mort ont une plus grande chance d'avoir un succès en réduisant le sentiment de stress s'ils font attention au processus.
Que pourrions-nous faire en tant que société qui augmente son esprit de jeu et réduit le fardeau du travail ? C'est là que je pense que nous avons beaucoup à apprendre des sociétés de chasseurs-cueilleurs.

------------Notes
[1] Larson, R. J., Richards, M. H., & Perry-Jenkins, M. (1994). Divergent worlds: The daily and emotional experience of mothers and fathers in the domestic and public spheres.
Journal of Personality and Social Psychology, 67, 1034-1046.
[2] Kohn, M. L. (1980). Job complexity and adult personality. In N. J. Smelser & E. H. Erikson (Eds.), 
Theories of work and love in adulthood. Cambridge, MA: Harvard University Press. Also, Kohn, M. L., & Slomczynski, K. M. (1990). Social structure and self-direction: A comparative analysis of the United States and Poland. Cambridge, MA: Basil Blackwell.


Publié le 25 Juin 2009 par Peter Gray



jeudi 1 octobre 2015

Libre d'apprendre BLOG27, Le jeu nous rend humain 3, Le jeu comme fondation de la religion

Le jeu nous rend humain 3, le jeu comme fondation de la religion
Avoir la foi est de faire semblant.

Certaines personnes se sentiraient offensées à l'idée que la religion est un jeu. Ils diraient que la religion est sacrée et que le jeu est futile. Comment l'un pourrait être lié à l'autre ? Mais les lecteurs qui suivent ce blog savent que je vois le jeu comme la plus haute forme d'activité humaine, si bien que je ne dévalorise pas la religion lorsque je la décrit comme du jeu.

J'ai deux points principaux à présenter dans cet essai. Le premier c'est que toutes les religions trouvent leurs racines dans le jeu. Les aptitudes cognitives qui rendent la religion possible sont les mêmes que celles du jeu, dont la principale est la capacité à faire semblant. Le deuxième point est que la religion fonctionne mieux quand elle ne s'éloigne pas trop de ses origines ludiques. La religion qui a perdu son esprit de jeu peut devenir dangereuse. Je présente ici la logique et les preuves qui m'ont amené à ces conclusions.

Avoir la foi est de faire semblant

L'essence de toutes les religions est d'avoir la foi. Avoir la foi est le fait de croire sans preuve. Croire sans preuve est de faire semblant. Faire semblant est jouer.
Tous les jeux humains impliquent un élément de simulation (voir l'essai sur la « définition du jeu »). Chaque joueur accepte, pendant toute la durée du jeu, un monde imaginaire particulier. Au jeu d’échecs par exemple, le monde imaginaire est celui qui figure l'une des formes miniatures comme étant un cheval et les chevaux ne peuvent se déplacer de bonds en L. La forme la plus pure de simulation est celle que l'on trouve dans les jeux de rôle des jeunes enfants qui imaginent régulièrement des mondes dans lesquels ils peuvent être des sorcières, des trolls, des voyageurs de l'espace, des mamans ou des papas en faisant participer le mobilier de la maison, le canapé peut alors être une maison hantée, un pont magique, une autre planète ou le bureau où travail une maman. Pour entrer dans le jeu, les joueurs ne demandent pas de preuves que telle chose ou telle autre soit vrai, ils décident simplement ou se mettent d'accord que cela est vrai. Suzie est une sorcière tandis que Jimmy est un troll pour la simple raison que tous les joueurs ont décidé et accepté cela. Les vérités des simulations sont des vérités par choix comme le sont les vérités des religions et non des découvertes.

Pour accepter une religion il faut choisir d'accepter de croire aux vérités de la religion, et dans ce sens au moins, toutes les religions sont du jeu. Les vérités du jeu sont vraies du moment et seulement à partir du moment ou le jeu continu. Quand le jeu se termine, ou pendant les pauses, Suzie et Jimmy peuvent dire qu'ils faisaient seulement semblant d'être une sorcière et un troll, mais ils ne l'auraient jamais fait en plein cours du jeu. En fait, il est impossible pour eux de le dire pendant le jeu, parce que le simple fait de la dire arrête automatiquement le jeu et crée une pause. La religion, pour le pratiquant, n'a pas de temps de pause reconnu, si bien que celui-ci n'a pas d'opportunités pour dire que ses croyances religieuses sont des simulations même si à un certain niveau de conscience ils savent que c'est le cas. En fait, si vous êtes pratiquant d'une religion, prenez le temps de considérer mon hypothèse. Vous ne perdrez pas votre religion en faisant cela. Votre pratique religieuse peut même profiter de cet exercice. Les enfants améliorent leur jeu et deviennent plus dévoués à leur jeu en faisant des temps de pause hors de ceux-ci en pensant et en reformulant aux vérités du jeu. La même chose est possible avec les adultes et la religion.

Mes pensées à propos de l'esprit ludique de la religion sont issues de l'année de mes 11 ans, un âge où l'on commence sérieusement à s'interroger sur le monde qui nous entoure. J’assistais régulièrement à la messe protestante et à l'école biblique du Dimanche. Comme un grand nombre de mes amis d'enfance j'avais beaucoup de difficultés à comprendre comment des personnes arrivaient à croire en ces histoires. Il était clair pour moi que la croyance ou le manque de croyance n'avait rien à faire avec l'intelligence rationnelle. Des personnes bien plus intelligentes et rationnelles que moi, et d'autres un peu moins, étaient des croyants pratiquants. Je me souviens que je pensais que la religion était une sorte de jeu, un jeu sur toute la vie et que les personnes savaient qu'il s'agissait d'un jeu mais ne voulaient pas le dire. C'était comme croire au père noël mais avec beaucoup plus de valeur. C'était une croyance que les personnes gardaient tout au long de leur vie plutôt que dans leur enfance seulement. [1]

Ces pensées de l'enfance à propos de la religion reposèrent dans mon esprit d'une manière relativement endormie jusqu'à très récemment, quand elles me remontèrent grâce à mes lectures à propos des religions sur les chasseurs-cueilleurs. Comme je l'ai noté dans mon « essai d'introduction », la totalité de cette série « Le jeu nous rend humain » a été inspiré par mon immersion récente dans la littérature scientifique d'anthropologie sur les chasseurs-cueilleurs.

Les chasseurs-cueilleurs sont ouvertement joueurs

J'ai découvert lors de mon immersion que où qu'elles se trouvent, les sociétés en bandes de chasseurs-cueilleurs (à distinguer des sociétés tribales bien plus complexes) ont certaines caractéristiques de base en commun. Parmi ces caractéristiques se trouve un haut niveau d'esprit de jeu qui se retrouve dans tous les aspects de leur vie sociale, dont font partie leurs religions. [2] La nature ouvertement joueuse des croyances religieuses et des activités des chasseurs-cueilleurs a renouvelé ma pensée concernant l'idée que la religion où qu'elle se trouve à ses origines dans la capacité humaine pour le jeu.

Les religions des chasseurs-cueilleurs sont ludiques et souvent amusantes

Toutes les religions des chasseurs-cueilleurs sont polythéistes, il y a plusieurs divinités et ces divinités sont elles-mêmes joueuses. Elles ne sont pas classées dans un ordre de puissance hiérarchique, elles ne donnent ni ne reçoivent aucun ordre mais sont les joueurs égaux de drames prenant place dans le monde de l'esprit qui est parallèle ou monde physique dans lequel les chasseurs-cueilleurs vivent. Les divinités elles-mêmes ne sont ni bonnes ni mauvaises, mais un mélange des deux comme le sont les vraies personnes. Elles sont souvent capricieuses et imprévisibles. Elles ne sont pas nécessairement concernées par la morale humaine. Elles peuvent aider ou blesser quelqu'un juste parce que cela leur chante et non parce que la personne le mérite ou pas.

Un personnage commun des religions de chasseurs-cueilleurs est ce que les mythologues appellent le « farceur », moitié astucieux, moitié empoté dont la moralité est ambivalente, il est celui qui s'arrange pour intervenir dans les plans les mieux conçus des autres divinités et humains. Le personnage « farceur » n'est pas forcément représenté dans une seule divinité, il peut être un aspect de la personnalité qui circule chez l'une ou chez l'autre. Les caractéristiques et les actions d'un grand nombre de divinité sont comiques. Cohérent avec leur philosophie égalitaire et leur moyen de se gouverner eux-même d'une manière non hiérarchique, les chasseurs-cueilleurs ne vénèrent pas leurs divinités. Ils n'ont pas de roi sur terre, ils n'en ont pas non plus au paradis. En fait, de la même façon qu'ils utilisent l'humour pour ramener au niveau un membre de leur bande qui montrerait des signes d'arrogance (voir le texte précédent) ils utilisent l'humour pour ramener au niveau toute divinité qui se penserait plus importante et élevée que les autres.

Voici un exemple pris dans le livre d'Elizabeth Marshall Thomas, « The Old Way » à propos des Jul'hoansi du désert africain Kalahari :
Gao Na, l'une des divinités Jul'hoan la plus importante, possède des caractéristiques qui pourrait nous faire penser au premier regard comme un Dieu des religions monothéistes modernes. Gao Na est le créateur de l'univers. Il a commencé par se créer lui-même puis les autres divinités, puis la terre, l'eau, le ciel, le soleil, les étoiles, la pluie, le vent, les éclairs, les plantes, les animaux et les êtres humains. Et pourtant en dépit d'un tel pouvoir créatif, Gao Na n'est pas particulièrement puissant dans d'autres domaines ni particulièrement sage. En fait, les Jul'hoansi dépeignent le portrait de Gao Na comme étant un bouffon.

Dans les histoires religieuses des Jul'hoans, Gao Na, le créateur de toutes choses, est incapable de contrôler les êtres qu'il a créés et il est continuellement la victime des autres. Par exemple, ses femmes le piègent souvent, encore et encore, en le faisant sauter dans un trou rempli d’excréments. Elles lui disent qu'il y a un éland bien gras qui se trouve sous un tas de branche, et alors qu'il va joyeusement vers les branches, il tombe dans le trou. Plus tard, après avoir fini de se nettoyer, elle lui raconte une autre histoire à propos d'une prise qui se trouve sous les branches, et il tombe de nouveau.

Quand je pense à cette histoire, je me souviens de cette bande dessinée ou le personnage principal, Charlie Brown, qui répète sans cesse que cette fois Lucy ne va pas retirer le ballon au moment où il va tirer. Comme Charlie Brown, Gao Na, n'apprend jamais. Nous savons qu'à chaque fois Lucy va retirer le ballon et que Charlie va le louper et tomber. Nous nous sentons peinés pour lui et pourtant nous rions. C'est une situation humaine qui est illustré par les histoires religieuses des Jul'hoan comme ça l'est dans les bandes dessinées de Schultz.

Les rituels religieux des chasseurs-cueilleurs ne sont pas distinguables du jeu

Les pratiques religieuses de la plupart des chasseurs-cueilleurs incluent la musique, la danse, parfois des costumes et un grand nombre de jeux. Les cérémonies religieuses les plus sérieuses pour la plupart des groupes de chasseurs-cueilleurs sont celles qui implique les exercices shamaniques. L'objectif principal de ce genre de cérémonies est la guérison mais elles fournissent aussi une opportunité pour les membres du groupe d’interagir personnellement et de manière diverse avec les membres du monde de l'esprit. Les individus qui ont le pouvoir de le faire (les shamans) entrent en transe lors de danses dans laquelle ils prennent les propriétés d'une divinité particulière pour communiquer avec elle.

Un chercheur, Mathias Guenther, a noté que cet état altéré est généralement atteint « sans substances hallucinogène mais grâce à une combinaison de tambours, de chants, de danses qui s'associent à un épuisement physique. » Il écrit plus loin : « Souvent le shaman est un comédien qui utilise une imagerie poétique riche et comique. Il peut chanter et danser, trembler, hurler et parler dans des langages étranges. Il peut aussi employer la prestidigitation et la ventriloquie. Les séances shamaniques sont surtout des performances où il n'est pas rare de voir participer le public. Cela crée une forme de jeu de rôles qui permet d'engager un dialogue avec les divers esprits que joue le shaman et qui servent ainsi de contre-rôles pour les autres. »[3]
Chez certains groupes de chasseurs-cueilleurs, le groupe entier est impliqué dans la danse, le chant et les tambours, tous sont alors shamans ou du moins contributeurs dans l'expérience shamanique. Chez les Jul'hoansis, pratiquement la moitié des hommes et un tiers des femmes sont capables d'entrer dans des transes shamaniques. Il semblerait que dans la plupart des groupes de chasseurs-cueilleurs, lorsque les esprits sont appelés à s'approcher lors de telles expériences ils ne soient pas traités avec révérence mais sont traités de la même façon que chacun se traite les uns les autres. La communication implique des blagues mutuelles, des moqueries, des rires, des chants et des danses en plus que les requêtes de guérison.

Les anthropologues se réfèrent aux cérémonies religieuses et shamaniques comme étant des « rituels », probablement parce que ce terme a été utilisé pour décrire toutes les cérémonies religieuses qui ont une sorte de structure régulière la constituant. Mais les cérémonies ne sont clairement pas des rituels dans le strict sens du terme, une adhésion sans créativité d'une forme prescrite. En fait, certains chercheurs sur les chasseurs-cueilleurs ont déclaré que les « rituels » religieux qu'ils ont observés ne sont pas distinguable du jeu. [4] Les cérémonies implique habituellement une grande variété d'actions auto-déterminés, créative, imaginative et pourtant guidé par des règles qui correspond à la *définition du jeu*.

Les chasseurs-cueilleurs ne font pas de confusion entre les croyances religieuses et les observations empiriques, et le concept d'hérésie n'existe pas chez eux

Les anthropologues ont souvent décrit les chasseurs-cueilleurs comme étant des personnes pratiques, peu versé dans la magie ou la superstition. Les guérisons shamaniques étant une exception notable qui peut d'ailleurs aboutir à une véritable guérison dans la mesure où la maladie aurait des composantes psychologiques.

En général, les cérémonies religieuses des chasseurs-cueilleurs a plus à voir avec le fait d'embrasser la réalité plutôt qu'il s'agirait d'une tentative d'altérer la réalité. Par exemple, dans son livre The Harmless People, Thomas décrit comment les Gwis (des chasseurs-cueilleurs voisins des Jul'hoansis) utilisent la danse sacrée de la pluie, non pas pour amener la pluie mais pour l'accueillir et prendre part à son pouvoir lorsqu'ils la voient arriver. Vivant dans le désert là où l'eau est un facteur limitant pour toute vie, ils pourraient très bien essayer de danser pour amener la pluie s'ils pensaient que cela marcherait, mais ils ne croient pas en de tels pouvoirs. Ils peuvent toutefois se réjouir de la pluie et utiliser son arrivée pour élever leurs propres esprits et se préparer eux-mêmes à son arrivée et l'abondance qui va suivre. Un autre chercheur, Richard Gould, dans son livre Yiwara sur la culture chasseur-cueilleur en Australie, a rendu compte de la même chose en montrant que les personnes « … n'essayent pas de contrôler l'environnement que ce soit dans leur vie quotidienne ou leur vie sacrée. Les rituels de la vie sacrée peuvent être vus comme un effort de l'homme pour s'allier à son environnement, pour devenir « un » avec lui. »

De mon point de vue, de telles cérémonies sont des formes de jeu dans lesquels des aspects du monde naturel, personnifiés dans des divinités deviennent des camarades de jeu.
Sur l'échelle qui distingue les religions tolérantes et les religions fondamentalistes de notre culture, celles des chasseurs-cueilleurs apparaissent se trouver à l'extrémité du côté tolérant. Bien que les chasseurs-cueilleurs trouvent un sens dans leurs histoires à propos du monde des esprits, ils ne traitent pas les histoires comme des dogmes. Des groupes qui sont voisins l'un de l'autre peuvent raconter des histoires identiques de manière variée ou en raconter d'autres complètement différentes qui contredisent des histoires, personne ne s'offenserait. Les cérémonies sacrées d'un groupe peuvent différer de l'un à l'autre et peuvent même varier considérablement à travers le temps. Les parents chasseurs-cueilleurs ne s'énervent pas lorsque leur enfant se mari avec le membre d'un autre groupe où il adoptera les croyances et les pratiques religieuses qui diffèrent du groupe où il a grandi. Pour quitter un groupe et en joindre un autre avec des pratiques religieuses différentes ressemble à celui qui quitte un groupe qui jouait à un jeu pour rejoindre un groupe qui joue à un jeu différent. Il semble y avoir une reconnaissance implicite parmi ces personnes, que les histoires religieuses, bien que dans un sens, soient importantes et même sacrées, ne sont à la fin que de simples histoires.

Les chasseurs-cueilleurs donnent de la valeur à leur croyance concernant le monde des esprits mais ils ne laissent apparemment pas leurs croyances interférer avec leur compréhension empirique du monde physique dans lequel ils vivent. Voici un exemple de cela qui est de nouveau fourni par Elizabeth Marshall Thomas. Quand on demanda d'une manière terre à terre à Toma, un sage Jul'hoansi ce qui arrive aux étoiles pendant la journée, il répondait naturellement, « Elles restent là où elles sont. Nous ne pouvons pas les voir parce que le soleil est trop brillant. » Mais à un autre moment, dans le cadre religieux, Toma a répondu à la même question avec une légende Jul'hoansi dans laquelle les étoiles sont des fourmi-lions qui rampent dans le ciel la nuit et reviennent se cacher dans le sable à l'aube du jour. Il n'était pas le moindre du monde contrarié par les contradictions entre ces deux explications. Je souhaiterais que toutes les personnes religieuses eussent la sagesse de Toma quand on en arrive à des controverses aussi stériles que sont celles de l'évolution face au créationnisme !

La religion est un jeu sacré qui donne du sens à la vie quotidienne

Une fonction générale de tout le jeu est de donner un sens à la vie des personnes et de les aider à faire face au monde réel. Comme je l'ai décris dans l'article précédent, le jeu aide les enfants à saisir la réalité. Jouer à être des sorcières et des trolls, par exemple, aide les jeunes enfants à penser à comprendre des aspects de leur monde réel qu'il serait difficile à appréhender sans cela. Cela est vrai même si l'enfant reconnaît clairement que le monde du jeu est imaginaire, qu'il n'est pas réel. En fait, le jeu ne servirait pas sa propre fonction si l'enfant ne faisait pas la distinction.

Une religion bien conçue offre une grande opportunité pour jouer tout au long de la vie en permettant aux personnes d'utiliser les structures à la base du jeu que sont les histoires, les croyances et les rituels en les accompagnant de leurs propres additions et modifications créatives qui permettent de donner du sens au monde et à la vie réelle. Les histoires et les croyances peuvent être comprises comme des fictions mais il s'agit de fictions sacrées parce qu'elles représentent des idées et des principes auxquels les personnes sont attachées et qui sont cruciaux pour leur permettre de vivre dans le monde réel. Il n'est pas surprenant selon moi, que les histoires et les croyances religieuses où qu'elles se trouvent sur terre reflètent et élaborent des idées et des thèmes qui sont cruciaux pour la société dans laquelle vit le pratiquant religieux. Les chasseurs-cueilleurs dépendent du principe d'égalité et de partage, il est donc normal que leurs divinités ne soient pas des dirigeants mais des égaux qui contribuent et parfois échouent à contribuer comme ils le devraient. Les chasseurs-cueilleurs dépendent aussi des caprices de la nature, qu'ils ne peuvent pas contrôler, il n'est donc pas surprenant que leurs divinités soient capricieuses. La meilleure façon de faire face à l'imprévisible est par l'humilité et l'humour, et leurs religions adoptent ces caractères. Leur tâche est d'adopter la nature telle qu'elle se présente, non pas de la contrôler et leurs jeux religieux avec les esprits du monde naturels les aide à faire cela.

Avec l'agriculture, la religion a changé. Les agriculteurs tentent de contrôler la nature et ainsi les dieux de l'agriculture sont ceux qui contrôlent les autres dieux. Avec l'agriculture, avec l'appropriation de terre et l'accumulation de richesses qui l'accompagne, l'égalitarisme a perdu son équilibre en voyant l'émergence des concepts de seigneurs et maîtres d'un côté et les serviteurs et les esclaves de l'autre. Il n'est alors pas surprenant de voir que les concepts hiérarchiques du monde des esprits à émergé dans les religions post-agricoles, avec un pic au Moyen Âge, quand les religions monothéistes comme l'islam et le christianisme sont devenue dominantes. À cette époque, la plupart des personnes étaient des serviteurs, il était alors naturel que les histoires et croyances religieuses portaient principalement sur les valeurs de la servitude et du devoir à l'égard du seigneur et du maître, et que Dieu était considéré comme étant le maître suprême, le roi des rois, le seigneur des seigneurs. De telles croyances donnaient du sens à la vie de servitude et aider les chefs à justifier leur pouvoir.

La religion tourne mal quand les éléments du jeu son perdu

Lors de l'évolution des religions (ou devrais-je dire leur non-évolution) du panthéon comique des chasseurs-cueilleurs aux monothéismes médiévaux, elles perdirent leur esprit ludique et devinrent plus dangereuse. La nature devint un ennemi plutôt qu'un ami, et le monde de l'esprit devint hiérarchique, les éléments de peur commencèrent à submerger l'élément du jeu. Dieu devint non pas un partenaire de jeu mais la source suprême de la punition et de la récompense, qui se doit d'être vénéré, servi et craint. En devenant sérieuses, les religions imaginaires commencèrent à être confondu avec le monde réel par les personnes.

Si les enfants qui jouaient aux sorcières et aux trolls ne savaient pas qu'ils faisaient semblant, nous nous inquiéterons. Nous savons que lorsqu'un enfant ne réussit pas à distinguer l'imagination de la réalité, cela peut être dangereux. Nous devrions savoir que cela est davantage vrai dans le cas des adultes et de la religion.

Les religions qui ont émergé avec l'agriculture et le féodalisme ont soutenu des horreurs qui auraient été inimaginables pour les chasseurs-cueilleurs. Les Aztèques sacrifiaient les êtres humains à leurs dieux en colère. Les chrétiens torturaient les personnes qu'ils appelaient sorcières et païens pour finalement les assassiner impitoyablement. Aujourd'hui, parmi certains groupes d'Islamistes nous voyons ceux qui font la promotion du suicide à la bombe, qui mettent leurs croyances religieuses au-dessus des intérêts des personnes. Si le service à Dieu est ce qui possède la plus grande valeur et si Dieu alors est redoutable, égoïste et punissant, si les religions sont confondues avec la réalité, alors toutes ces horreurs au nom de la religion sont possibles. La religion de ce genre « ne nous rend pas humain » contrairement au sens que j'établis dans le titre de cette série.

La chose remarquable aujourd'hui est que notre société continue à évoluer, et nos religions aussi. Alors que nous avons quitté l'âge médiéval et entré dans une ère de démocratie croissante, de nombreuses personnes ont repris le monothéisme de leurs ancêtres et y on réintroduit l'esprit ludique. Dieu devient de nouveau un ami plutôt qu'une puissance qu'il faut craindre. Les personnes arrêtent de se disputer pour savoir quelle religion est la bonne. Ils commencent à reconnaître que de tels arguments n'a pas plus de sens que de savoir lequel du jeu d'échecs ou du jeu de dames est un vrai jeu. Si cette tendance continue, nous pourrions compléter le cercle et de nouveau apprécier la religion de la même façon que l'on fait les chasseurs-cueilleurs.

Pour garder la religion du côté de l'humanité plutôt que contre elle, nous avons besoin de rafraîchir continuellement son esprit de jeu. Le jeu sacré encourage le meilleur de notre nature humaine, améliore notre bien-être et est amusant. La religion qui manque de jeu est suicidaire.

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Notes
[1] J'ai appris depuis que bien sûr mes pensées sur la religion comme étant un jeu ne sont pas originales. Un nombre de théologiens hautement respecté ont déjà posé ces idées à l'écrit. One such book, for example, is David L. Miller's (1970)Gods and Games: Toward a Theology of Play. An interesting and relatively recent article on the topic is "Play and Religion: Indication of an Interconnection," in the Journal of the Asian Research Center for Religion and Social Communication, 2 (#1), 2004. There, K. P. Aleaz, an Indian scholar, makes a special case for the playfulness of Hindu religions, which, more than most other modern religions, have retained their historic folk-religion roots. 

[2] An account of my conclusions from this immersion into the hunter-gather literature can be found in my article, *Play as the foundation for hunter-gatherer social existence. American Journal of Play, 1, 476-522, 2009(link is external).* Most of the ideas in the present series of essays, on "Play Makes Us Human," are presented there with documentation. In this essay I have repeated, in parts of several paragraphs, some of the same language I used in that  larger article.
[3] Mathias Guenther, "From Totemism to Shamanism: Hunter-Gatherer Contributions to World Mythology and Spirituality," in R. B. Lee & R. Daly (Eds.), The Cambridge Encyclopedia of Hunters and Gathers (1999), 426-433.
[4] See, for example, Daisaku Tsuru, "Diversity of Ritual Spirit Performances among the Baka Pygmies in Southeastern Camaroon," African Study Monographs, Suppl. 25 (1998), 47-83.


Publié le 18 Juin 2009 par Peter Gray, traduit le 01 Octobre 2015 par Michaël Seyne